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La fin d’année sur les marchés a été marquée par la remontée des taux d’intérêt des emprunts d’Etat des grands pays. Ce mouvement répond en partie au message lancé à la mi-décembre par les banques centrales, notamment la BCE, sur la nécessité de poursuivre le resserrement monétaire, mais à un pas moins marqué.
Ainsi, le taux sur les Treasuries américains à 10 ans a monté de plus de 40 points de base (pb) sur la période, alors que celui des Emprunts allemands gagnait plus de 60pb, soit atteignant le niveau le plus haut de l’année 2022 à 2,6%. Cette hausse n’a évidemment pas plu aux bourses qui ont perdu du terrain. Ces dynamiques sont en ligne avec notre diagnostic d’un début 2023 difficile pour les marchés. L’horizon devrait s’éclaircir dans le courant de l’année, mais la prudence dans l’allocation d’actifs reste pour l’instant de mise d’après nous. La question de l’inflation reste un des sujets majeurs. Pour nous la question n’est pas si l’inflation va baisser en 2023. On en est convaincu. Le sujet est la vitesse avec laquelle ce recul va se faire. Les banques centrales des deux côtés de l’Atlantique attendent une décélération de l’inflation graduelle, d’où leur vigilance. Alors qu’au niveau des biens, les prix se tassent grâce à une moindre demande et la disparition de goulets d’étranglement, sur les services la progression des salaires devrait empêcher une baisse rapide. Les chiffres d’inflation en Espagne, pour le mois de décembre montrent que si bien le prix de l’énergie baisse, l’inflation sous-jacente continue de progresser, à 6,9% en glissement annuel contre 6,3% en novembre. Aux Etats-Unis, l’indicateur préféré de la Fed, de déflateur de la consommation a reculé mais à une vitesse moindre que prévu, avec l’inflation cœur à 4,7% en glissement annuel, contre 5% le mois précédent. L’inflation va entamer son reflux d’autant plus rapidement que la croissance économique va perdre de sa vigueur. Sur ce point, on constate que la croissance a été bien plus résiliente qu’attendue en Zone Euro comme aux Etats-Unis ces derniers mois. Les PMI de S&P comme les enquêtes nationales montrent que nous subissons une contraction légère de l’activité en Zone-Euro, en dépit des chocs subis. Les aides des gouvernements, essentiellement pour atténuer le choc énergétique, semblent contenir de manière marquée l’ajustement de la demande. Ceci permet, notamment, que le marché de l’emploi reste résilient. Un constant similaire est visible aux Etats-Unis, avec même une accélération de l’activité en fin d’année, et ce malgré des indicateurs avancés qui se détériorent. La force du marché du travail est là encore une source importante de cette résistance de la demande. Ce vendredi nous en saurons plus avec la publication du rapport sur l’emploi américain pour le mois de décembre, avec une attente de 200 mille créations d’emplois. En Chine, la croissance reste plombée par la crise sanitaire. Le gouvernement a certes pris la décision de privilégier la croissance au détriment de la situation sanitaire liée au Covid, mais cette dernière pèse tout de même sur l’activité. Le nombre de contagions a explosé, même si les statistiques sont fragiles étant donné que les tests systématiques ont été abandonnés. Les PMI officiels ont confirmé la détérioration de l’activité au mois de décembre, avec une baisse très forte dans les services. Le redémarrage de l’économie chinoise sera très graduel, malgré le changement de stratégie des autorités chinoises.
Les prix de l’énergie restent une des clés pour la dynamique économique à venir et reflètent aussi les tensions qui persistent concernant la guerre en Ukraine. Les prix du pétrole ont repris leur marche ascendante depuis le début décembre 2022. Ceci traduit la résilience de l’activité économique mondiale, mais aussi des perspectives d’offre de brut qui pourraient s’avérer moins favorables. Parmi ces facteurs on trouve le fait que les Etats-Unis ont décidé de recommencer la reconstitution de leurs réserves stratégiques après les avoir réduites constamment depuis des mois afin de peser à la baisse sur les prix. Aussi, l’incertitude sur le pétrole russe reste forte. De combien l’offre de brut russe sera-t-elle coupée ? Entre l’effet du plafond sur les prix du pétrole russe, imposée par le G7, et les mesures de représailles de la Russie de réduire sa production, il est difficile d’avoir de la clarté sur l’équilibre entre offre et demande. En même temps, alors que le prix du pétrole monte, le prix du gaz en Europe baisse. En effet, les stocks importants de gaz qui ont été constitués et une demande qui se modère, notamment grâce à des conditions climatiques favorables, a permis de retrouver un prix de gros pour le gaz autour de celui qui prévalait avant le début de la guerre en Ukraine. C’est une bonne nouvelle pour les Etats européens et pour les économies de la région.
Aussi, pour le moyen terme, soulignons que l’objectif de réduction de l’utilisation des énergies fossiles reste bien présent. En particulier, l’aide aux pays émergents pour financer la transition reste d’actualité, avec une aide de 15 milliards de dollars apportée au Vietnam pour stimuler l’utilisation des énergies renouvelables (50% à l’horizon 2030), après des aides considérables attribuées à l’Indonésie et à l’Afrique du Sud. De même, soulignons la décision du gouvernement japonais de revenir sur le nucléaire.