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Fig.1 Etats-Unis : L’inflation américaine surprend à la hausse en février car l’inflation sous-jacente ralentit moins vite
L’inflation américaine totale a accéléré de 3,1% à 3,2% en février, dépassant les attentes pour le troisième mois consécutif.
La hausse de l’inflation reflète la hausse attendue des prix de l’énergie en février (+2,3% sur le mois) alors que les prix alimentaires restent stables. Cela ne veut pas dire que les pressions inflationnistes réaccélèrent. Les mesures d’inflation tendancielle comme l’inflation tronquée ou l’inflation médiane continuent d’ailleurs de ralentir, même si elles restent plus élevées.
Mais la surprise à la hausse vient de l’inflation sous-jacente (hors énergie et alimentation), qui ralentit moins qu’attendu, de 3,9% à 3,8%. Sur le mois de février, les prix sous-jacents progressent de 0,36%, ce qui un peu moins élevé qu’en janvier (+0,39%) mais est tout de même la deuxième plus forte hausse depuis 10 mois. Et si la saisonnalité explique peut-être une partie de cette hausse des prix en février, son impact est probablement nettement moins important que sur les chiffres de janvier. Ce dynamisme des prix cœurs est donc plus embêtant.
Après deux mois de hausses de prix élevées, l’inflation sous-jacente réaccélère en rythme séquentiel (sur 3 mois, 6 mois…) au-dessus de 4%, ce qui pose question sur la poursuite de la normalisation de l’inflation.
Fig.2 Etats-Unis : L’inflation des services, plus persistante, explique désormais la totalité de l’inflatio
En termes de composantes :
Fig.3 Etats-Unis : Le prix des biens s’est normalisé, participant moins à la désinflation
Fig.4 Etats-Unis : Le prix des loyers reprend sa tendance baissière après son accélération surprise en janvie
Fig.5 Etats-Unis : L’inflation dans les services domestiques ne ralentit toujours pas vraiment
En réalité, nous ne pensons pas que les pressions inflationnistes réaccélèrent, contrairement à ce que suggère le prix des services hors logements, mais qu’elles n’ont pas commencé à clairement baisser et qu’elles restent trop élevées.
Comme nous l’avons souvent noté, le prix des services volatiles impactés par la réouverture post-Covid et par le choc énergétique de 2022 (tourisme, transport) avait exagéré la hausse des pressions inflationnistes dans les services en 2021-2022 mais aussi exagéré leur reflux en 2023. Comme pour le prix des biens, la fin de la normalisation du prix de ces services volatiles révèle que les pressions inflationnistes domestiques n’ont pas vraiment baissé depuis un. Ainsi notre mesure de l’inflation dans les services domestiques moins volatiles ne reflue que marginalement depuis un an et reste élevée à près de 6%.
Cela est cohérent avec la persistance des tensions sur le marché de travail, qui ne reflue que lentement en l’absence de ralentissement économique net des Etats-Unis.
Fig.6 Etats-Unis : L’inflation sous-jacente devrait continuer de ralentir mais vers 3%, pas encore 2%
Nous pensons toujours que l’inflation sous-jacente va continuer de refluer dans les prochains mois, grâce à la baisse graduelle de l’inflation des loyers et dans les services domestiques maintenant que les salaires commencent à ralentir légèrement. Cette prévision est basée sur nos anticipations d’un ralentissement un peu plus marqué de l’économie que le consensus, mais s’il ne sera pas forcément abrupt (nous prévoyons une croissance américaine de 1,8% cette année contre 2,1% pour le consensus).
Mais nous pensons qu’elle risque de baisser moins nettement à partir de la seconde partie de l’année, sauf en cas de récession, et d’avoir du mal à passer nettement sous les 3%, ce qui sera encore assez nettement au-dessus de la cible de la Fed.
Fig.7 Etats-Unis : La Fed devrait baisser ses taux, mais pas trop tôt et pas trop rapidemen
Si nous avons raison, le fait que l’inflation revienne vers des niveaux plus raisonnables et que les pressions inflationnistes commencent à se détendre graduellement devrait permettre à la Fed de commencer à réduire ses taux qui sont actuellement à des niveaux restrictifs. Mais la Fed devrait rester prudente face au risque que l’inflation s’encre au-dessus de sa cible. C’est pourquoi nous anticipons « seulement » 3 baisses de taux cette année à partir de juin, et 3 baisses supplémentaires l’année prochaine. Le taux de la Fed resterait donc en territoire restrictif dans les deux ans à venir.
Notre scénario est proche mais encore légèrement plus prudent que le scénario du marché, même après le net repricing du marché depuis le début de l’année.
Fig.8 Royaume-Uni : le taux de chômage monte à 3,9% en février, le niveau le plus élevé depuis janvier 2022
Le marché de l’emploi anglais ralentit plus nettement début 2024, même si cela reste progressif.
Le taux de chômage augmente pour la première fois depuis mi-2023 en janvier, de 3,8% à 3,9%. Et cela vient de la légère baisse de l’emploi total sur les trois derniers mois (-21 mille) alors que le taux de participation est resté stable. Par ailleurs, la tendance semble se poursuivre en février avec une légère accélération de la baisse des offres d’emplois vacantes (au plus bas depuis mi-2021) et de la hausse du nombre de chômeurs (+17 milles).
Cela dit, le taux de chômage reste proche de ses plus bas historiques et le nombre d’emplois salariés augmente moins vite en février mais reste positif. On est donc loin d’un effondrement du marché de l’emploi, qui reste encore assez tendu.
Fig.9 Royaume-Uni : les salaires ralentissent enfin depuis des niveaux très élevés
La bonne nouvelle vient du ralentissement des salaires, qui se poursuit début 2024.
Les salaires hors bonus augmentent de 5,9% en janvier en glissement annuel après 6,2% fin 2023 et un pic à 8,5% mi-2023. Cela reste trop élevé mais, en rythme séquentiel, la hausse des salaires se stabilise autour de 3,5%, soit un rythme proche du niveau pré-Covid.
Le marché de l’emploi doit encore se détendre pour s’assurer que les pressions salariales continuent de refluer, mais la tendance est encourageante.
Après la présentation d’un budget raisonnable la semaine dernière et ces chiffres de salaire encourageants, la Banque d’Angleterre pourrait adopter un discours moins restrictif que ces derniers mois la semaine prochaine même si une baisse des taux avant l’été reste peu probable.