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Powell et Lagarde ont discuté de pourquoi il est difficile de décider s’ils doivent encore remonter les taux directeurs un peu davantage, mais sans donner d’indication claire quant à savoir s’ils vont remonter ou non leurs taux en septembre.
Fig.1 Fed : le taux directeur a probablement atteint son point haut, malgré des risques encore haussiers.
Le discours de Powell a pu sembler dur à première vue. Il a insisté sur le fait que la Fed était prête « à remonter davantage ses taux si nécessaire » et pensait « maintenir sa politique en territoire restrictif » jusqu’à être confiant que l’inflation baissait durablement vers la cible. Et vu la ré-accélération inattendue de l’activité cet été, il a indiqué que le processus de désinflation restait incertain et avait « encore un long chemin à parcourir ». Enfin, il a réaffirmé que la cible de la Fed « était et resterait » un retour de l’inflation à 2%, alors que certains analystes spéculent sur une hausse de la cible d’inflation.
Cela plaide pour des taux élevés maintenus un certain temps, avec l’objectif de ramener l’inflation vers les 2% et non pas de s’arrêter quand l’inflation sera revenue durablement vers les 3%. C’est notre scénario depuis longtemps, que le marché a mieux intégré en août en réduisant ses anticipations de baisse des taux pour l’année prochaine.
Fig.2 Powell confirme que le niveau du taux neutre est incertain, mais que les taux actuels sont bien restrictifs
Mais la position de Powell est moins agressive que ces deniers mois, en suggérant que la Fed passait à une nouvelle phase où la gestion des risques (dans les deux sens) devenait plus importante. En effet, Powell a dit que la Fed « procéderait de façon plus prudente » dans les prochaines réunions, en se laissant le temps d’analyser l’évolution des données et des perspectives. Cette position est soutenue par le ralentissement plus marqué de l’inflation depuis juin, qui permet à la Fed de prendre son temps. Nous pensons que la Fed fera une pause dans les prochains mois et, si nous avons raison sur le fait que la croissance va ralentir plus nettement vers la fin de l’année, qu’elle ne remontera plus ses taux au-delà de leur niveau actuel.
Fig.3 Fed : Contrairement au premier semestre, les marchés aident la Fed en fixant des conditions financières plus restrictives depuis cet été
Notons que contrairement à la première partie de l’année, les marchés font une partie du travail de la Fed depuis juin. La hausse des taux longs sur les marchés et son impact négatif sur le prix des actifs risqués entraînent un durcissement des conditions financières pour l’économie malgré le ralentissement des hausses de taux directeurs. C’est une des raisons pour laquelle nous pensons que l’économie américaine devrait ralentir plus nettement dans les prochains mois, même si la Fed ne remonte pas davantage ses taux.
Fig.4 BCE : Le débat autour d’une dernière hausse de taux en septembre reste ouvert
Côté BCE, Lagarde n’a pas donné plus d’indications sur la réunion de septembre qu’elle ne l’avait fait après la réunion de juillet : cela peut être une pause ou une hausse. Si elle a réitéré le message dur de la BCE (les taux seront augmentés autant que nécessaire pour aussi longtemps qu’il le faudra), elle a aussi insisté sur le haut niveau d’incertitudes dans ce nouveau régime économique post-Covid. Par exemple, le risque que l’inflation soit structurellement plus élevée plaiderait pour des taux plus élevés, mais le ralentissement économique actuel suggère que l’impact des hausses de taux passés pourrait être plus important qu’anticipé.
Nous penchons pour une pause, étant donné la forte dégradation de la conjoncture cet été, même si le risque d’une hausse ne peut être écarté vu que l’inflation sous-jacente n’aura pas montré de net signe de ralentissement d’ici là.
La position difficile de la BCE se reflète dans les discours de ses membres depuis celui de Lagarde. Les membres habituellement agressifs ont rapidement indiqué que plus de hausses de taux restaient nécessaires tant que l’inflation ne ralentirait pas plus clairement. Au contraire, les membres habituellement plus prudents souhaitent une pause dans les hausses de taux le temps de voir l’étendu du ralentissement économique actuel. Les prochaines données et surtout les nouvelles projections économiques du staff de la BCE seront déterminantes pour la décision de septembre.